Par David Joly, référent REV Hauts-de-France
On allait voir ce qu’on allait voir : après la pandémie ayant causé 30 000 décès et confiné tout le pays durant presque deux mois, après un second tour des municipales où le vote en faveur de l’écologie a été tel que nombre de médias n’ont pas hésité à parler de vague verte, après le compte rendu de la Convention citoyenne pour le climat intimant aux gouvernants d’engager sérieusement et concrètement des mesures à très court terme en faveur de l’environnement, Emmanuel Macron était formel : il avait reçu le message cinq sur cinq et avait surtout changé, n’étant plus le président des riches et de la finance mais un président responsable et dorénavant préoccupé par l’intérêt général qui va, réchauffement climatique oblige, être forcément de plus en plus dépendant de la politique environnementale mise en œuvre.
Preuve allait en être le nouveau gouvernement que nous allions voir naître, qui allait rompre de façon fracassante avec son prédécesseur tout dévolu aux lobbies et à la sacro-sainte croissance.
Pour être surpris, nous avons été grandement surpris : qui aurait parié qu’un président qui revendique depuis le début de son quinquennat la modernité miserait sur un casting ministériel tel que celui présenté ce lundi 6 juillet 2020 ? Pour le coup, il est aussi moderne que Pompidou…
Pour changer, gardons les mêmes !
Apparemment, dans l’esprit d’Emmanuel Macron, le changement radical, ça ne passe pas par le changement de personnel, loin de là : sur les seize ministres nommés, onze faisaient déjà partie du gouvernement précédent. Sur ces onze reconduits, six conservent le même portefeuille. Ajoutez à cela deux autres promus qui étaient déjà présents en tant que secrétaires d’État. [1]
Autant de personnes qui seraient donc convaincues qu’il faut dorénavant faire l’exact contraire de ce qu’on leur demandait jusqu’ici : voilà une prise de conscience collective inédite dans l’histoire politique de ce pays !
Plus sérieusement, ce semblant de remaniement est surtout la confirmation que la politique à venir ne changera pas d’un iota par rapport à ce qu’elle était avant le confinement : priorité à l’économie prédatrice, au PIB, aux dividendes, bref, à la richesse.
Et la richesse aux yeux de ce président et de son équipe gouvernementale se mesurera toujours en euros et jamais au regard du bien-être et de l’état de santé du vivant.
Trois petits « nouveaux »
Les entrants potentiels auraient éventuellement pu donner l’impression d’un vent de fraîcheur et de sang neuf capables de convertir leurs collègues bien en place à la nécessaire révolution éthique, sociale et environnementale, que nombre de citoyens ont appelé de leurs vœux à travers les élections municipales, dont le second tour s’est tenu une semaine auparavant et où les candidats locaux marqués du sceau présidentiel ont littéralement été balayés, témoignant ainsi du rejet massif de la politique gouvernementale par les citoyens français, quoi qu’en dise l’Elysée. [2]
Le profil de deux d’entre eux vient cependant confirmer l’aspect droitier, conservateur et amoral de ce nouveau gouvernement.
Qui, de façon sincère, a pensé ne serait-ce qu’une seconde à l’arrivée au sein de celui-ci de Roselyne Bachelot ? Question modernité et rupture avec l’ancien monde, quelle réussite !
Ministre sous Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy de 2002 à 2012, elle avait été à l’époque une ministre de l’Environnement toute dévouée au lobby cynégétique à qui elle avait offert des périodes de chasse aux oiseaux migrateurs, en total porte à faux avec la directive Oiseaux européenne. Elle avait également clairement affiché son admiration pour la corrida.
Selon son entourage, elle aurait nettement évolué sur la question de l’éthique animale, ayant pris position dernièrement pour le droit des animaux.
Sera-t-elle un gage de modernité et de renouveau dans le domaine culturel et au-delà ? Nous ne demandons qu’à le constater.
Le monde de la culture pourra toujours se consoler en pensant au monde de la justice. Car, pour le coup, Emmanuel Macron a fait très fort en portant son choix sur la personne d’Éric Dupond-Moretti.
Un avocat qui cherche depuis des années à faire le buzz en acceptant de défendre des personnalités plus que controversées, à l’image des époux Balkany, grands spécialistes de blanchiment de fraude fiscale.
Une nomination qui a rapidement fait l’unanimité… contre elle, les premiers intéressés considérant celle-ci comme ni plus ni moins, une déclaration de guerre de la part du président de la République. [3]
Sans parler des sorties verbales machistes fracassantes du nouveau Garde des sceaux qui promettent de grands moments d’échanges constructifs avec Elisabeth Moreno, chargée de l’égalité hommes-femmes… [4]
Côté éthique animale, on ne peut reprocher au personnage d’être ambivalent puisqu’il se réclame haut et fort comme fervent amateur de la mort-loisir et de la mort-spectacle. [5]
Le troisième entrant concerne le ministère de la Transition écologique où l’on retrouve Barbara Pompili.
D’abord adhérente d’Europe-Écologie-Les-Verts sous les couleurs desquels elle devient députée en 2012, elle intègre par la suite le gouvernement socialiste où elle est en charge du secrétariat dédié à la Biodiversité. En 2017, elle quitte EELV pour rejoindre La République en marche sous la bannière de laquelle elle est réélue à son poste de députée.
Si, au vu de son engagement et de ses actes passés dans le domaine de l’écologie, on peut s’attendre de sa part à de la bonne volonté et à une sensibilité sincère envers le domaine géré par son nouveau ministère, quelle sera sa marge de manœuvre dans un tel gouvernement, à la tête duquel on retrouve Jean Castex, un très proche de Nicolas Sarkozy (dont l’action présidentielle en termes d’écologie se résume à sa déclaration « L’environnement, ça commence à bien faire ! ») et de Xavier Bertrand, véritable écocidaire au sein de la région des Hauts-de-France ? [6]
Le véritable objectif d’Emmanuel Macron était double : d’une part rassurer ses soutiens historiques quant à leur propension future à poursuivre leur enrichissement personnel. D’autre part à faire le vide autour de lui, sans l’ombre d’une menace d’un ministre populaire, dans l’optique de l’échéance présidentielle de 2022.
Mission pleinement accomplie pour le chef de l’État. Au détriment, comme de coutume, du vivant.
[6] https://reporterre.net/Dans-les-Hauts-de-France-Xavier-Bertrand-fait-la-chasse-aux-ecologistes
tellement vrai…. personnellement, je n’attendais rien de plus de ce gouvernement, ou alors du pire…. On bat les cartes, on les distribue, on se refile les ministères, plus on est incompétent, mieux on est considéré, on fait du fric, on rempli son compte en banque, on blablate, on se fait des bouffes et on blablate encore. Coté actes ? surtout pas !! ou alors pour passer la pommade aux pires ! chasseurs, industriels, agriculteurs et éleveurs intensifs… pour ça ils sont très forts, très compétents. “LE reste” peut crever. comme toujours….